HYPOCRISIE
POSTHUME
&
PRISME
DEFORMANT
Oyez, oyez, « inter-notes »
des horizons cybernétiques et de la Terre du Milieu et demi ! Souffrez que
je vous entretienne, braves gens, d’une humeur qui me taraude l’âme. Une humeur
au cerveau, en quelque sorte.
Je connaissais déjà le génie reconnu post mortem de
certains grands compositeurs du passé, dont Bizet, Schubert et Mahler furent
les plus illustres exemples. Le reniement caractérisé de Berlioz par nous,
Français, et ressuscité un siècle plus tard par eux, Anglais… Et tant d’autres
similitudes exaspérantes pour le mélomane que je suis et que je vous invite à
devenir si vous êtes présentement profanes ou sourds. Non seulement la culture
guérit les maux, mais les mots pour le dire guérissent votre serviteur. La
musique adoucit les moeurs, toutefois il serait naïf de croire que TOUTES les
musiques adoucissent TOUTES les moeurs ! Nos gouvernements successifs devraient se
pencher sur ce problème, au lieu de favoriser des adorations factices et
passagères pour mieux manipuler nos chères têtes blondes lorsqu’elles seront
brunes ou chauves. Mais je m’égare, car le débat est tellement vaste que l’on
introduirait une phalange philharmonique par le gros bout d’un entonnoir, pour
la voir ressortir, par le petit bout, déguisée en un orchestre militaire qui
diffuse en cadence son abjecte cacophonie.
Donc, nous avons la fâcheuse habitude de découvrir le réel talent
de nos artistes alors qu’ils ne sont plus de ce monde. Mais également leurs
présumées qualités humaines. Passés de l’autre côté du miroir de l’affiche, les
voici devenus soudainement des « intouchables ». Ils ne sont pas
qu’immortels, ils sont INTOUCHABLES !
Ainsi, aujourd’hui, j’entends dire ici et là que Louis de Funès,
Fernandel et Bourvil, pour ne citer qu’eux, étaient de fabulous men en
dehors des caméras. On peut affirmer cela quand on s’adresse à des amnésiques,
oui, mais pas à moi, non… et pas à vous, n’est-ce pas ? Je ne suis pas
dupe de cette hypocrisie posthume. Vous l’êtes, vous ? Je ne vous crois
pas.
Je me souviens parfaitement que j’étais choqué quand, jadis,
étant ado, j’entendais dire du mal de mes comiques préférés. Qu’ils étaient instables, capricieux,
cyniques avec leurs proches, leurs ami(e)s… Moi, franchement, je m’en tapais le
coquillard de les savoir ainsi ; ce qui comptait, c’était de rire à leur
contact cinéphile ou télévisuel. Et puis, au nom de quoi la vie privée des
artistes nous regarde-t-elle, nous intéresse-t-elle ? Est-ce que la nôtre
les passionnerait ? Les scénaristes l’utilisent pour proposer des idées de
film à des réalisateurs, je sais… Et il existe même des brèves de comptoir
issues des troquets de la France d’en bas et qui semblent attirer dans les
théâtres friqués les représentants de la France d’en haut. Ecoutez, qu’importe
si untel a lâché un pet en public, a giflé son gosse qui faisait pipi contre le
mur du voisin, si son dernier film m’a fait me bidonner sur mon siège, au cinéma
ou devant la télé. Nous sommes en France, que diable… pas aux States, bordel !
Oh, my God ! I am very sorry.
Enfin, actuellement, une nouvelle mode a vu
le jour : la beauté virtuelle de certaines vedettes. Ou plutôt l’attitude
des présentateurs télé – ou d’autres médias – qui se croient investis d’une mission
de flatterie commerciale et vantent le pseudo-esthétisme des pseudo-stars en
question. Car quoi, braves gens, n’est-ce pas leur talent qui interpelle, leur
charisme artistique qui fascine ? Qu’ils/elles soient moches ou bossu(e)s,
qu’ils/elles aient les jambes arquées, les fesses molles, c’est bien l’émotion
qu’ils/elles dégagent qui font d’eux/elles des gens à part, des artistes,
hein ? Ceci dit, reconnaissons que, sur un plan strictement physique, il
n’y a pas photo entre B. Bardot, M. Monroe, G. Lollobrigida et les épouvantails
que l’on encense gratuitement de nos jours sur les ondes ou par voie
hertzienne. Et j’ignore comment elles se débrouillent pour être toutes LA
plus belle femme du monde. Récemment, j’ai ouï que Cameron Diaz était l’une
d’elles ; j’ai frôlé l’apoplexie, l’infarctus façon fracture asociale. Je
préfère encore Emmanuelle Béart et sa bouche de grenouille siliconée ou
Béatrice Dale et ses dents écartées entre lesquelles passerait une baguette
chinoise assimilée à un cure-dents, c’est clair. Pareil dans le domaine de la
« Variété » ; pareil pour le talent virtuel…
Pourquoi ce besoin d’abrutir les influençables ?
Déjà, ne le sont-ils/elles pas assez ? Influençables, pas abruti(e)s… Que
de complexes en parallèle de ce fanatisme esthétique ne naissent-ils pas, alors
que ces canons de beauté tirent à blanc ? Que de dépressions nerveuses ne
sont-elles pas engendrées en fonction des images truquées que des filles
admirent sur des magazines mythomanes ? Par la suite, elles chercheront
tellement à ressembler à leur modèle remodelé sur ordinateur – ainsi, on retape
des souris avec une souris – qu’elles en égareront leur véritable personnalité,
leurs repères anatomiques ! Mais je pense que les hommes sont tout de même
un peu responsables de cet état de fait, non ? Puisque ces messieurs, on
les accepte tels qu’ils sont, alors… Bref.
Voilà, rien de bien grave, mais reconnaissez qu’il fallait que
cela soit dit fort et clair.
Attendez, ne raccrochez pas, merci…
La prochaine fois, je reviendrai ici vous toucher deux mots (deux
maux ?) sur la reproduction des morpions en milieu glabre.